Cette petite étude menée à la Johns Hopkins Medicine confirme et décrypte des liens entre l’obésité et l’insuffisance cardiaque : les chercheurs montrent tout l’impact de l’obésité sur la structure musculaire chez les patients atteints d’une forme d’insuffisance cardiaque appelée insuffisance cardiaque avec fraction d’éjection préservée (ICFEp). Ces conclusions, présentées dans la revue Nature Cardiovascular Research, expliquent aussi l’efficacité des médicament utilisés pour traiter le diabète, connus sous le nom d’inhibiteurs du SGLT2 pour le traitement de l’ICFEp.
L’insuffisance cardiaque avec fraction d’éjection préservée (ICFEp) représente plus de la moitié de tous les cas d’insuffisance cardiaque dans le monde. Aux seuls États-Unis, l’ICFEp représente plus de 3,5 millions de cas. Cette maladie cardiaque est associée à une pression artérielle élevée et à une croissance musculaire excessive (hypertrophie) qui « cherche » à contrer la pression. L’ICFEp survient plus souvent chez les patients souffrant d’obésité sévère et de diabète. Les taux d’hospitalisation et de mortalité chez les patients atteints d’ICFEp étant assez élevés (30 à 40 % sur 5 ans), il est essentiel de comprendre ses causes sous-jacentes.
D’autant qu’il existe encore très peu de thérapies efficaces contre l’ICFEp, et le manque d’études sur le tissu cardiaque humain pour déterminer exactement ce qui est anormal constitue un défi pour le développement de thérapies.
L’auteur principal, le Dr David Kass, professeur de médecine à la Johns Hopkins explique que les symptômes de l’ICFEp sont similaires à ceux observés chez les patients dont le cœur est faible. Cependant, dans le cas de l’ICFEp, la contraction cardiaque semble normale alors que des symptômes d’insuffisance cardiaque sont présents.
« L’ICFEp est un syndrome complexe, impliquant des anomalies dans de nombreux organes »
La piste des inhibiteurs du transporteur sodium-glucose 2 (SGLT2) : plusieurs études ont montré l’efficacité des SGLT2 contre l’insuffisance cardiaque, ce médicament utilisé pour traiter le diabète étant même actuellement le seul fondé sur des preuves pour l’ICFEp permettant non seulement de réduire les symptômes, mais aussi les taux de réhospitalisation à long terme et la mortalité.
Les agonistes du GLP1, des médicaments antidiabétiques et de perte de poids ont également été testés chez les patients atteints d’ICFEp, et sont également apparus efficaces contre les symptômes de l’ICFEp.
Les premières preuves d’efficacité dans l’ICFEp de ces traitements indiqués au départ pour le diabète puis l’obésité, dessinent un premier lien entre l‘obésité et l’insuffisance cardiaque.
L’étude va plus loin, analyse et observe, via microscopie électronique, un petit prélèvement de tissu musculaire de 25 patients diagnostiqués avec ICFEp à différents degrés, avec diabète et/ou l’obésité et a comparé ces prélèvements à ceux effectués chez 14 donneurs d’organes dont le cœur était en bonne santé. La microscopie électronique a permis d’obtenir une image très claire de l’intérieur des cellules, des mitochondries (centrales énergétiques cellulaires) et des sarcomères (unités de fibre musculaire). Ces observations révèlent :
- des anomalies ultrastructurelles présentes dans les tissus des patients les plus obèses atteints d’ICFEp ;
- leurs mitochondries sont gonflées et dysfonctionnelles, présentent de nombreuses gouttelettes de graisse ;
- les sarcomères semblent en lambeaux ;
- ces anomalies n’apparaissent pas liées au fait que le patient soit diabétique ou non et plus le participant est obèse, plus ces anomalies sont marquées.
Les implications sont nombreuses : d’abord pour générer des modèles fidèles de l’ICFEp ; savoir si la réduction de l’obésité, comme c’est le cas actuellement avec plusieurs thérapies médicamenteuses, peut permettre d’inverser ces anomalies cellulaires et de réduire l’ICFEp ; une cible pour de nouvelles thérapies de l’ICFEp.
Source: Nature Cardiovascular Research 25 July, 2024 Myocardial ultrastructure of human heart failure with preserved ejection fraction
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